Sunday, July 02, 2006

Madame de Lafayette, La princesse de Clèves

La Princesse de Clèves

Comment ne pas apprécier cette écriture si particulière? A l'image de la cour, le premier tome n'est qu'apparence, surface et extériorité. Au fur et à mesure du livre, on rentre dans la vie de cette femme, au début partiellement, pour arriver dans l'intimité même de sa conscience et de ses sentiments. Comment ne pas comprendre ce trouble dans lequel se déchirent son amour et sa raison? Comment ne pas se sentir totalement troublé par les sentiments si forts qui l'animent et contre lesquels elle lutte sans cesse? Pourquoi ce refus de céder à son amour, même après la mort de son mari? La raison qu'elle en donne parait ,certes, légitime, mais elle ne me contente pas. Pourquoi se censurer et s'empêcher la passion? Pourquoi ne pas y céder? Désir de passion éternelle à jamais assouvie, désir de désirer sans cesse, d'être désirer à jamais, peur de l'engagement, du laisser-aller. Sa position dans tout le livre est une position de contrôle, d'auto-contrôle d'elle-même sur ses faits, ses gestes, ses sentiments...Le moment de l'aveu de son amour est une véritable bouffée d'oxygène dans laquelle on a l'impression de pouvoir enfin respirer! Mais on attend, toujours cette attente de l'union, d'un baiser...rien. Cet amour reste impalpable. On a toutefois un sentiment de suffisance à la fin de ce livre, d'un amour qui a vécu ce qu'il avait à vivre, mais le contrôle permanent est quelque chose qui représente une véritable souffrance, une douleur continuelle qui pourtant, apporte un certain contentement dans le renouveau continuel de la passion amoureuse et de la recherche désespérée de signaux presque invisibles la découvrant.
Pourquoi est-ce qu'il m'est nécessaire de tourner les pages où mon père était seul avec moi? Pourquoi ces photos m'attirent-elles autant qu'elles m'effraient? Peur de retrouver cet amour du père, en le refusant totalement je m'en protège, mais ce refus n'est pas une solution car il met en suspens la relation en l'"oubliant".
Peur de la déception et de ne pas savoir y parer, il vaut mieux un rien qui ne déçoit pas.
Pourquoi lui en vouloir alors que c'est moi qui est rompu le lien? Pourquoi n'a-t-il pas insisté? Pourquoi ne s'est-il pas affamé de mon silence? Pourquoi a-t-il fait comme s'il allait faire avec, sans en souffrir de trop? Je voulais qu'il hurle de douleur, je voulais qu'il vienne me voir pour le dire qu'il m'aimait...mais j'ai trop peur, trop peur qu'il ne revienne. Comment gérer cette haine que j'ai envers lui et ces liens que je sens encore tellement forts? J'ai peur. Je me rapproche géographiquement, pas pour lui, mais lui me tend des perches pour que l'on se revoit. et maintenant je ne veux pas, je ne veux pas qu'il fasse parti de ma vie, seulement au téléphone. je me suis construite avec son absence, avec ce vide que j'ai su combler par d'autres modèles, je ne veux pas tout avoir à recommencer. Je sais la déception inévitable quand on met en avant sa vie d'homme plutôt que sa vie de père, raison pour laquelle je refuse ce lien qu'il tente tant bien que mal de recréer, de tisser entre nous...j'ai peur...

bébé ballotin

A la vue de ces photos, l'idée d'un bébé ballotion me vient en tête: l'enfant comme un objet, objet de l'amour bien-entendu, que l'on passe de bras en bras, de lieux en lieux pour le montrer, pour l'exhiber. Toute la famille y passe et c'est normal, une naissance, c'est une vie nouvelle, une approche nouvelle de la vie. Un nouveau membre est arrivé, il faut le montrer au corps familial pour qu'il reçoive son aval et qu'il crée d'hors et déjà le lien. A peine est-on né que l'on est, dans sa particularité associé au tout.
Je rêve de cette période résolue, de cette période où le monde était pour moi totalement inconnu et objet de découverte sans cesse. L'unité du monde était présente je le pense, mais pour qu'il y ait ce lien social, ce lien aux autre, l'unité doit se rompre et diviser la réalité. Je rêve ce retour à la vie post-natale, avant même que le langage me soit apparu, pour découvrir sans aucune idée précédente le monde tel qu'il m'entoure. Mais je hais cette dépendance que je dois aux personnes, je n'aime pas la dépendance!!!

album photo

Deux jours à peine et ce sont les premières photos. Une crevette. Premiers rapports à la mère, rapports difficiles car impossibilité de transmission du lait. Je n'attrape pas le sein, je n'y arrive pas...sentiment d'échec de la mère je suppose de ne pouvoir nourrir son enfant...le lien est là, mais je n'arrive pas à le saisir...distance et proximité...

Saturday, July 01, 2006

Le complexe d'Oedipe est un désir inconscient du jeune garçon de tuer son père et de se marier avec sa mère. Et la petite fille dans tout ca? N'a-t-elle pas les mêmes désirs? L'amour d'un père et de ce fait, la jalousie, la comptétition avec sa mère? La recherche d'amou et de reconnaissance du père est primordiale chez la jeune fille. Besoin de tendresse, de regard, d'admiration, de réconfort, d'un regard aimant et fier, toutes ces choses sont nécessaires à la jeune fille...Elle les a! Quel bonheur! mais aussi quel trouble quand tout s'en va, d'un coup d'un seul. On passe d'un tout à un rien. Pourquoi ce rien, est-ce le néant? Si l'on considère que c'est de l'être, mais que ce n'est rien, alors on accèpte un rien comme tel et on se construit en connaissance. Ou alors, on décide de stopper toute conception d'existence et d'être, et on pense la personne comme n'étant plus, comme un néant, un vide immense. Dans ce cas-là, l'absence ne se fait quasiment pas sentir, car il n'y a plus...il n'y a pas la transition de la déception de voir un père longtemps idéalisé comme étant simplement un être humain, il y a le vide et le souvenir d'un père aimant...comment gérer le conflit du néant et du recontact avec un père dont on ne sait ce qu'il deviendra?
comment comprendre, accepter, changer sa vision du père, vision centrale et première de l'homme?

cette myrrha, c'est moi...myrrha-je ou réalité, je ne le sais encore...

Myrrha


"Hélas! dit-elle, où vont s'égarer mes pensées? Que veux-je entreprendre? Ô dieux que j'implore, ô piété filiale, ô droits sacrés de la nature, empêchez un tel sacrilège! Souffrirez-vous un si grand crime? Mais est-ce un crime en effet? Non, le sang ne condamne point les feux dont je brûle. Eh! les animaux ne s'assemblent-ils pas sans choix? est-ce une honte pour la génisse de s'accoupler avec son père? Le cheval fait de sa fille son épouse; le bélier rend féconde la brebis qu'il a engendrée; l'oiseau, de la semence de celui par qui il fut conçu, conçoit lui-même. Heureux privilège! l'homme s'est fait des lois bizarres dont la jalouse rigueur défend ce que la nature autorise; et pourtant, on l'assure, il est des contrées où le fils et la mère, le père et la fille, enchaînés par un double lien, voient l'amour accroître leur tendresse. hélas! que ne suis-je née en ces lieux! C'est le hasard qui m'opprime, le hasard de la naissance. mais pourquoi retomber dans mes funestes pensées? Loin de moi, espoirs interdits! Oh! ce prince mérite bien d'être aimé, mais d'être aimé comme un père. Eh quoi! si je n'étais pas la fille de Cinyras, du noble Cinyras, je pourrais dormir dans ses bras. Ainsi donc c'est parce qu'il m'est tout qu'il ne m'est rien. Tout mon malheur est de lui tenir de trop près. Une étrangère serait plus heureuse.
Ah! Fuyons, quittons les champs de la patrie! Etouffons mon crime et mon amour! mais j'aime, et un mal trompeur me retient. Etre là, auprès de Cinyras, le voir, le toucher, lui parler, sentir sa bouche sur la mienne, c'est beaucoup à défaut d'autre espérance. D'autre espérance? Et que peux-tu prétendre au-delà, fille impie? Quoi! ces noms, ces droits que tu profanes, ne les connais-tu pas? Dis, seras-tu la rivale de ta mère, la fille de ton amant, la soeur de ton fils et la mère de ton frère? Ne crains-tu donc pas les soeurs aux cheveux hérissés de sombres serpents ni les torches vengeresses, menaçantes, qu'elles agitent devant les yeux des coupables épiuvantés? Ah! tant que ton corps est encore exempt de souillure, ne souille point ton âme. ne souille pas par un accouplement interdit les lois de la nature toute puissante. Suppose même que tu y sois décidée: tu as contre toi la force des choses. Il est trop bon père, lui, trop attaché au sens du devoir. Oh! comme je voudrais qu'il partageât mon égarement!"

Myrrha, Les Métamorphoses, livre 10, Ovide.